Clip Clap : notre sélection de clips animés #29

Regulièrement, Kiblind donne la parole à l’artiste derrière l’artiste : l’illustrateur.rice chargé·e de retranscrire la musique en images. Retrouvez nos clips musicaux animés préférés décryptés par celles et ceux qui les ont fabriqués.

Kiblind donne la parole à l’artiste derrière l’artiste : l’illustrateur.rice chargé.e de retranscrire la musique en images. Retrouvez nos clips musicaux animés préférés décryptés par celles et ceux qui les ont fabriqués.

STUCK IN THE SOUND – Sensational

llustrateur / animateur : François-Marc Baillet

Salut François-Marc ! Quelles étaient les volontés de Stuck in the Sound pour ce clip ?

Pour ce clip, les Stuck ont tout de suite exprimé leur envie d’avoir une narration dans le clip, aussi simple soit elle. On a pu discuter ensemble de leur vision du deuil qu’évoque les paroles de ce morceau. Ensuite, ils ont été super ouverts à toutes mes propositions. Ce que j’ai beaucoup aimé, c’est qu’une de leur volonté était que ça ait du sens pour moi de faire ces images, c’était vraiment très agréable de travailler avec eux. 

Peux-tu nous décrire les différentes étapes de conception ? 

J’avais travaillé sur le découpage d’un film qui parlait du deuil (One more step) et ça a été le point de départ de ce film. Après montage d’une animatique (storyboard filmé), j’ai rapidement fait des illustrations en couleurs pour donner un aperçu du rendu final. Ensuite, ce sont toutes les étapes classiques d’un film d’animation 2D: layout, décors, animation, clean, couleur et compositing pour assembler le tout. Enfin, une dernière passe de montage pour affiner si besoin. 

Tu as été entouré d’une belle équipe d’animateur·rices, comment vous êtes-vous répartis le travail ? 

J’ai préféré trouver du soutien pour l’animation. Les décors, je les ai fait seul car j’ai un rapport privilégié avec cette étape. Pour la plupart des plans, chaque animateur ou animatrice devait mener le plan jusqu’au clean. C’est à dire tout faire sauf la colorisation des dessins. J’ai fait appel à une assistante animatrice pour aider l’équipe sur le clean colo. Ils ont été vraiment super et à l’écoute. Plus le temps passe et plus mon focus va sur le déroulement paisible de la production. On a beaucoup de combats à mener sur notre dessin, l’environnement doit être le plus porteur possible pour les artistes.

Quelles références / sources d’inspiration ont-elles nourrit la direction artistique de ce clip ?

Comme souvent dans le cinéma d’animation en France, on peut sentir le tiraillement entre l’animation japonaise et américaine. Il y a forcément aussi une influence de l’illustration en général. Le début du film lui, fait écho aux films de Michael Dudok de Wit qui m’ont profondément marqué pendant mes études.

Tu fais aussi de l’illustration plus traditionnelle. Quelle place prend l’animation dans ton travail ?

J’essaye dés que je peux, de trouver du temps pour faire des illustrations. Pendant la fabrication du dernier long métrage auquel j’ai participé au studio Foliascope, j’ai trouvé l’énergie et le temps de faire une série de grand formats sur papier. J’essaye de partir à l’aventure et de me mettre un minimum de contraintes. L’animation nous demande de faire le geste tout de suite bien et souvent sur ordinateur, sur le papier et avec les pastels dans l’atelier, c’est l’espace de la liberté.

TERRAIN VAGUE – L’Aventure

Illustrateur / animateur : Léo Bivas

Salut Léo ! À l’origine, qu’est-ce qui t’as donné envie de te lancer dans le stop motion ?

Salut Kiblind ! Comme beaucoup d’enfants, j’ai été influencé par le studio Aardman avec Wallace et Gromit et Chicken Run, ainsi que par les productions de Laika, qui se sont développées peu de temps après L’Étrange Noël de Monsieur Jack.

Cependant, lorsque j’ai réalisé ma première animation à l’âge de 11 ans, je n’avais pas toutes ces références en tête. L’idée m’est venue après avoir vu une publicité où une action se déroulait au ralenti, avec la mention « 200 images par seconde ». C’est à ce moment-là que j’ai compris que des images successives pouvaient former une vidéo, un mouvement. Après cette révélation, je me suis mis à faire du stop-motion constamment pendant des semaines.

Peux-tu nous décrire les différentes étapes de réalisation de ce clip ?

Pour ce projet, c’était assez simple. À l’origine, il n’était pas prévu pour être un clip. C’était simplement une animation en boucle destinée à illustrer la chanson (un visualizer). Après quelques échanges avec Valentin (VGK) de Terrain Vague, nous avons décidé de lui redonner du peps en ajoutant des zooms et des inserts en rythme avec la musique pour le transformer en clip.

Nous avons abordé ce projet comme une expérience libre et amusante, ce qui collait bien avec le sujet. C’était la première fois que je m’aventurais à faire une animation au style un peu « cheap ». Cela contrastait totalement avec le clip que j’avais réalisé précédemment pour MC Solaar, sur le titre « Candyman », existant sur Youtube aussi.

Et donc pour le clip de Terrain Vague, nous avons utilisé des dessins, de la sculpture en pâte à modeler, et des cure-dents pour maintenir la structure de la voiture et des personnages. Ensuite, nous avons procédé au tournage et au montage, en retirant les fonds verts pour intégrer l’animation d’arrière-plan que Valentin et Alicia avaient créée ensemble à partir de cartons découpés et des collages simples. La vérité, c’est que Michel Gondry nous inspire beaucoup. Il est connu pour son style visuel inventif et sa capacité à transformer des rêves en réalité cinématographique.

Quelle est l’étape que tu préfères quand tu fais du stop motion, et pourquoi ?

Je ne pense pas qu’il y ait une étape qui me plaise plus qu’une autre. Cependant, j’apprécie particulièrement le montage, car c’est le moment où toutes les étapes et les efforts se rassemblent. Il y a donc ce côté satisfaisant de voir l’effort récompensé. Je pense que pour n’importe qui, réalisant un film, le montage est la partie la plus concrète, car il finalise en quelque sorte le projet. Que ce soit l’écriture, la préparation ou le tournage, on est jamais sur à 100%. Toutes ces étapes précédentes sont essentielles, mais elles restent théoriques tant qu’elles ne prennent pas vie à l’écran, au montage.

Y a t’il un ou plusieurs films d’animation qui t’ont spécialement marqué ?

Comme je l’évoquais précédemment, j’ai grandi avec les films du studio Aardman, tels que Wallace et Gromit et Chicken Run. Il est vrai que Tim Burton et Henry Selick ont particulièrement retenu mon attention avec L’Étrange Noël de Monsieur Jack. Tout y était étrange et particulier. Cela m’a immédiatement captivé, car c’est une sorte de dessin animé lugubre, mais avec de la vraie matière et de la vraie lumière. Je pense que cela joue un rôle dans la proximité que l’on peut ressentir avec ce genre d’animation, car il utilise les matériaux de notre monde. Ainsi, c’est comme si leurs mondes existaient réellement. Et c’est plus tard, en grandissant, que l’on apprend qu’effectivement, ils existent physiquement ! Ce qui rend la chose d’autant plus magique.

L’animation stop-motion est très énergivore, même pour un clip de quelques minutes. Arriverais-tu à te projeter dans la réalisation d’un long métrage ?

Peu d’animateur·rices ou de réalisateur·rices ont réussi à produire et réaliser un long métrage en stop-motion. Il faut au moins 4 à 6 ans pour réaliser ce genre de long métrage, sans compter le temps nécessaire pour trouver le scénario idéal de 90 pages. Donc on peut facilement imaginer une décennie. De plus, la réussite au box-office est toujours incertaine. Si j’y parviens un jour, cela voudra dire que je serai un cas exceptionnel ! Honnêtement, je ne pense pas y arriver un jour, mais il ne faut jamais dire « jamais », car la vie nous emmène parfois là où nous ne pensions pas aller et c’est ça l’aventure !

AMERY – Spirit is Broken (Amery in Paris mix)

Animation : Jordan “Dr. Cool” Minkoff 

Salut Jordan ! Ton univers est toujours très cartoonesque. Quels sont les cartoons qui t’ont laissé une empreinte à vie ?

Bizarrement, j’ai très peu d’influences (à ma connaissance) qui viennent des dessins animés. Parmi les œuvres qui m’ont le plus inspiré au début de ma carrière d’animateur, il y a le clip Genius of Love de James Rizzi et les animations expérimentales de personnes telles que Norman McClaren. J’ai récemment entendu parler de Sally Cruikshank parce que j’ai vu des gens comparer mon travail au sien. C’est très flatteur ! Beaucoup d’autres influences viennent de la peinture. J’ai aussi grandi en voulant dessiner des logos d’équipes de la NBA, alors peut-être que c’est aussi une influence ?

Peux-tu nous décrire la façon dont tu as réalisé ce clip pour Amery, étape par étape ?

La première étape était de parler des idées avec Amery. D’habitude, je trouve les concepts tout seul, mais Amery est aussi une animatrice qui a une vision très forte. Nous avons donc dû assouplir nos visions et passer 20 minutes à réfléchir ensemble à quelques idées. Elle s’était récemment rendue à Paris pour une tournée et avait demandé à un caricaturiste de dessiner un portrait amusant d’elle. Ça semblait donc être une bonne base sur laquelle travailler. J’ai dessiné quelques croquis, je lui ai montré quelques exemples et j’ai tout dessiné image par image. J’ai édité et ajouté mes touches finales secrètes. Je n’ai jamais réussi à comprendre le code des boucles de visualisation, mais celle-ci fonctionne plutôt bien.

Si tu devrais faire une caricature de ton propre travail, ça ressemblerait à quoi ? 

Il aurait probablement 20 yeux, 30 nez, 100 oreilles et une bouche géante. Je lui donnerais probablement des muscles énormes, peut-être des bottes à semelles compensées et un balai volant tout neuf pour se déplacer.

En 2022, on t’avait déjà posé quelques questions à propos de ton clip pour Weird Nightmare, qu’est-ce qui a changé pour toi depuis ?

Pas grand-chose, je travaille toujours en freelance, je fais toujours des clips musicaux. Je suppose que je me suis amélioré dans l’animation ? J’ai réalisé quelques clips dont je suis assez fier et je parle toujours de la nécessité de trouver des financements pour faire des films.

Est-ce que l’idée de faire un long métrage est quelque chose qui t’es déjà passée par la tête ?

Oui, tout le temps. Réaliser des clips musicaux est amusant, mais finalement, c’est beaucoup de travail qui fait naître beaucoup d’idées qui ne se concrétisent jamais. À mi-chemin de la réalisation d’un clip, je pense toujours à la façon dont je pourrais transformer le concept en un long métrage ou au moins en un court métrage. J’aimerais passer à la réalisation de films, utiliser des effets sonores et autres pour donner vie aux animations plutôt que de faire jouer de la musique par-dessus. Je suis prêt ! Mais je dois aussi dire que j’accepterais n’importe quel travail en ce moment. Vous embauchez ?

ICHON – Il faut

Animation : Corentin Williams & Vilain Vidéo

Salut à vous deux ! Combien de dessins ont-ils été nécessaires à la réalisation de ce clip ?

Hello Kiblind ! Plus de 4000 dessins pour environ 1200 finaux. Le clip est en 6 images par seconde. Nous voulions quelque chose de brut, nous étions deux et nous avons travaillé dans une certaine urgence.

Pouvez-vous nous parler plus précisément du travail d’animation et de montage ?

Après plusieurs écoutes, on a posé un storyboard puis un premier découpage en fonction du son et des paroles pour bien séquencer.
On a ensuite travaillé l’animation par plan et développé chaque scène associée. Le montage s’est effectué au fur et à mesure et les transitions sont arrivées naturellement. On a opté pour des ramettes A4 et des pinceaux à l’encre de chine. Ce qui nous a permis de jongler rapidement entre dessins de ligne et apports de masse.

Chaque dessin vient accompagner les paroles de ce morceau. Qu’est-ce que vous ont évoqué ces paroles à la première écoute ?

On connaît Ichon depuis longtemps, c’est un ami avant tout. À la première écoute, on l’a retrouvé comme à ses débuts un peu. Et puis le son est profond et on s’est retrouvé sur beaucoup de valeurs.

Comment vous êtes-vous formés en animation ?

On a tous les deux suivi des formations d’histoire de l’art, de graphisme et d’animation. Sur les bancs de la fac, en alternance. Après plusieurs années de freelance et de passion pour l’animation, on s’est lancé sur ce projet avec Ichon.

Quels sont les clips qui vous ont particulièrement marqué ?

« 90210 » de Travis Scott, « Behind bars » de Slick Rick, « Yell oh » de Trippie Redd, « Jaywalking » de Valee, « Off top » de Earl sweatshirt, « Walking » de Ryan Larkin, « Suzie » de Myth syzer.

LA SÉCURITÉ – Ketchup

Animation : Philippe Beauséjour

Comment t’es venu l’idée de la composition de ce clip ? 

Le texte de la chanson semblait parler de la banalité des petites conversations. Des conversations qui sont souvent inspirées de ce quʼon voit à la télévision (la météo, les bulletins dʼinformations et les publicités). Jʼai donc créé quatre tableaux de téléviseurs montrant ce genre de contenu.

Quelles ont été tes références / inspirations ici ? 

En faisant du collage animé, lʼesthétique vient des images que je trouve dans les livres et magazines. Jʼavais déjà une bonne collection de téléviseurs, visages et mains. Le reste mʼest venu tout seul.

Peux-tu nous décrire sa réalisation étape par étape ? 

Je commence en mʼamusant. Je trouve des images que jʼaime et je construis autour de ça. Ensuite, je compose un cadrage et je crée la typographie. En faisant lʼanimation, je trouve souvent dʼautres idées et je retourne à lʼétape de découpage.

Tu sembles avoir une sensibilité pour les images vintage. Quelle est la période qui te fascine le plus graphiquement et pourquoi ? 

Les échantillons que jʼutilise viennent, pour la plupart, des années avant 2000. Je pense que je préfère ça, à cause des anciennes techniques dʼimpression (avant lʼère de l’imprimante laser). Je prends les photos de très près car jʼaime voir les textures. De nos jours, tout est toujours trop propre ; même les vidéos clip punk sont filmés en 4K et trop dʼartistes travaillent sur des programmes 3D.

Lors de notre dernière interview, tu venais de finir ton premier court-métrage. En as-tu réalisé d’autres depuis ? Ou est-ce dans tes projets ?

Jʼai lʼintention dʼen réaliser dʼautres mais, cʼest énormément de travail pour quelque chose qui me demande dʼaller chercher moi même les subventions. Avec le contractuel, cʼest facile; les clients mʼengagent avec le budget quʼils ont déjà. Par contre, avec mes propres projets, jʼai une plus grande liberté. Je peux parler de politique (chose dont on a de plus en plus besoin avec le rehaussement de la droite).

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